Passée par la gymnastique et les arts du cirque, mais aussi inspirée par la danse ou encore les arts martiaux, Chloé Moglia a mis la suspension au cœur de son travail, dans tous les sens du terme.
Car si elle se frotte au vide, l’artiste suspensive, dans ses performances fondées sur la lenteur et l’étirement de chacun de ses gestes, suspend aussi le temps. Chacun de ses spectacles nous entraîne ainsi dans une sorte de rêverie hypnotique, loin des contingences terrestres. Dans ce « poème sonore et graphique à quatre mains » composé en direct avec la compositrice multi-instrumentiste Marielle Chatain, Chloé Moglia fait d’un simple tableau noir son point de départ. À la craie, elle peuple ce tableau d’une ronde de personnages poétiques… avant d’envoyer valser les lois de l’apesanteur, s’élançant à plusieurs mètres au-dessus du sol. Sur la ligne brisée suspendue à travers la scène, comme une branche, la voilà qui évolue avec une précision de haïku, suspendant notre attention à la force de ses bras. Chamboulant les oppositions entre le lourd et le léger, la surface et le trait, le haut et le bas, cette femme-oiseau, en se mettant à la renverse, nous permet surtout de voir le monde autrement. À couper le souffle.